dimanche 18 octobre 2015

Avec ou sans filtre ?


Connaissez-vous l'expression "être pris pour un jambon" ? Ou "se faire rouler dans la farine" ? Ou le super combo "être pris pour un citron qui en fait est un jambon ?"... ce serait étonnant, celle-là, elle est de Lillie.
Depuis le temps, vous devriez savoir qu'elle invente toute sorte d'expressions, plutôt imagées. Sûrement son côté sudiste qui ressort - toujours mieux que de l'illustrer dans une quelconque émission de télé-réalité, non ?
Cette expression, Lillie l'utilise en cas de frustration due au comportement inopportun d'un membre plus ou moins proche de son entourage, susceptible donc de "l'avoir prise pour un jambon" ou, en jargon plus causant, de "la prendre pour une truffe".
Et étonnamment, ça lui arrive assez souvent ces derniers temps.
On dira ce qu'on voudra, la gentillesse, de nos jours, ça se fait certes rare, mais ça se fait surtout pas mal violenter.


Imaginez une personne qui soit serviable dans l'absolue, même nantie de quelques défauts. Pour que ce soit plus simple, nous prendrons Lillie comme actrice principale, dans le rôle du jambon.
Enfant, Lillie était déjà sympa. Inviter ses copines à son anniversaire et les voir jouer avec ses cadeaux en la laissant seule à table, sans qu'elle ne s'énerve, c'est être sympa. Conne, mais sympa.
Proposer à tous ses potes de venir goûter chez elle, et les voir préférer aller chez la fille qu'elle déteste, que tout le monde déteste, et les laisser prendre - avec le sourire - la bouffe qu'elle a acheté pour partir avec, c'est être sympa. Conne mais sympa.
Travailler avec des gens, les faire profiter de ses idées, et les voir filer avec, puis détruire sa réputation gratuitement, sans se fâcher, et continuer à bosser comme si de rien n'était, c'est... non c'est pas sympa, c'est stupide.


Mais Lillie a bon dos, que voulez-vous. Elle aura beau gueuler, dire des gros mots, invoquer tout un tas d'expressions fort imagées qui laisseront l'assemblée hilare, au final, elle ne fera pas grand chose qui pourrait faire du mal, de la peine, à qui que ce soit. Parce que comme beaucoup d'humains, elle sait bien ce qui fait mal. Et si, à l'occasion, elle a pu essuyer les attaques de personnes mauvaises, malsaines, malveillantes et/ou tout simplement stupides, elle ne veut pas infliger ce genre de choses à d'autres.
Ce qui fait d'elle, hormis son débit de paroles quasi ininterrompu, une personne de confiance et d'écoute. Vous avez un pet de travers à 2h du matin ? Votre mec vous a foutu dehors manu militari et vous ne savez pas où crécher ? Votre boss vous pourrit la vie et vous avez besoin d'en parler ? La jeune femme répondra présente, la plupart du temps (oui, quand même, elle a une vie, à l'occasion...).
Parce qu'entre autre chose, elle ne sait pas dire non. Et elle ne résiste que difficilement aux appels de détresse. Ce qui implique régulièrement des situations plus ou moins loquaces, à plus ou moins long terme, où la jeune femme peut jouer les docteur Love, coach en développement personnel, copine de comptoir, ou accompagnatrice de beuverie. Dit comme ça, on pourrait croire que c'est une sainte. Oui, mais non. Loin s'en faut, heureusement. Ce n'est pas une sainte.
C'est une empathique. Les problèmes des autres deviennent les siens. Et c'est une mission que de les résoudre. Dans la mesure du possible.

Et probablement que la plupart du temps, les solutions se résolvent sans son concours. Toujours est-il que Lillie essaie de prêter une oreille attentive à qui la demande.
Or, force est de constater que, telle Joséphine Ange Gardien avec 50 bons centimètres de plus et une coloration impeccable, elle est oubliée dès que le monde revient à la normale. Comme si aucun de ses conseils n'avait été prodigué. Comme si à aucun moment, elle n'avait pu décrocher à 3 heures du mat', pour tenir éveillée la copine bourrée qui conduit pour rentrer à la maison.
Qu'on ne se méprenne pas : une bonne action ne vaut que si elle est désintéressée. Soyons d'accord là-dessus. Néanmoins, admettez, ne soyez pas faux jeton, qu'un petit merci, une fois de temps en temps, ça ne troue le cul à personne, et ça fait un peu plaisir. Si-si. Quand même.

Et bien, "Merci", est un mot que Lillie couve comme une grosse poule monomaniaque - autrement dit, elle s'assoie dessus. Comme il est facile d'oublier une qualité chez une personne dès lors que sa présence se fait moins nécessaire ? Comme il est amusant de constater que malgré les conseils prodigués, on se souviendra de ses défauts en priorité. Fierté ? Orgueil ? Ingratitude ?

Alors quand, à son tour, vient le jour où Lillie se trouve en situation bancale, devinerez-vous ce qu'elle fait ?
Rien.
Du moins, éviter de demander de l'aide.
Bien sûr, la jeune femme va râler. C'est son plus grand talent, de loin le plus évident. Elle va râler à haute voix, avec cynisme et humour, mais refusera le moindre coup de main, le moindre conseil qui pourrait lui renvoyer l'image d'une personne en détresse. Pourquoi, direz-vous ? Il est agréable d'être supporté-e-s parfois. Oui.
Mais non.
Étonnamment, ceux-là même qui vous oublient quand vous avez été présents au moment charnière de leur vie, sauront se souvenir qu'ils vous ont tendu une main secourable quand vous en aviez besoin. Vous saurez avoir une dette envers vous. Vous vous coltinerez l'image de la personne jetée à la mer, vouée à la noyade sans leur concours honorable.

Soutenir les projets des autres, ça, Lillie sait faire. Mais qu'il s'agisse d'un projet à elle, énorme ou banal, et la foule se clairsème autour d'elle. Ainsi, écrire et publier, partager son travail en attendant un retour qui ne vient pas, lui paraît parfois plus difficile, quand elle même se fait une mission de complimenter, conseiller ou simplement s'intéresser à celui de ses amis. Comme quoi, l'ascenseur est souvent en panne.
Quoi faire ? Demander un peu d'aide ? De la participation ? Un brin d'intérêt pour l'énergie qu'elle fournit dans tout ce qu'elle peut entreprendre ? Un soutien dans les projets qui la tiennent éveillée ?

Des clous, oui ! Hors de question ! Lillie galère, rame, coule, remonte. Seule, autant que faire se peut. Avec une armure de guerrière et l'épée au point.
Et comme personne n'a jamais vu Xéna abattue, assise sur le bord du trottoir le glaive au fourreau, à cause d'une pure journée de merde, Lillie râle, se plaint, hurle, crie, renonce, baisse les bras. Pour mieux repartir, cri de guerre en gorge, et colère au front.


Parce que l'aide, la présence, l'écoute, ne sont pas des choses qui se marchandent. On l'a, ou on ne l'a pas. Et quand on l'a, il vaut mieux faire le deuil du tout petit mot "Merci", si court, si ridicule, mais si puissant.Et si on a de la chance, on finit, au détour d'un chemin inattendu, par tomber sur un compagnon d'armes, qui protègera vos flancs autant que vous le ferez pour lui. 

Pour les autres, un conseil : ouvrez l’œil. Un pote qui vous ouvrira toujours sa porte, même au plus mauvais moment de sa semaine, qui décrochera son portable à toute heure pour vous écouter pleurer, encore, la perte de votre moitié, qui viendra picoler des coups alors même que "Hook, ou la revanche du Capitaine Crochet" passe à la TV (déconnez pas avec ça, c'est un film culte !), ça ne coure pas les rues...

Ce pote, il est là, parce qu'il ne sait pas faire autrement. Parce que les problèmes des copains deviennent ses problèmes. Et quand ils sont contents, alors tout va bien. Ça rigole, ça boit des coups en disant des cochonneries.

Et pour le reste ? On lève le menton, on serre les fesses, et on fonce dans le tas.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire